Pandémies anciennes et susceptibilité aux maladies

07/11/2022

La pandémie de COVID-19 laissera certainement des traces profondes dans la conscience collective. Mais elle aura peut-être modifié nos organismes à un niveau bien plus microscopique, comme semblent l’avoir fait d’autres pandémies. Petit retour en arrière historique …

En effet, une étude publiée fin Octobre a étudié l’impact qu’ont eu les diverses pandémies au cours de l’Histoire sur le génome humain. Il n’est pas surprenant que les maladies infectieuses constituent une des pressions de sélection les plus puissantes. D’après la théorie de l’évolution, la pression de sélection est définie comme « un phénomène se traduisant par une évolution des espèces vivantes soumises à certaines contraintes environnementales ». Des gènes impliqués dans la réponse immunitaire auraient donc permis une sélection positive des individus porteurs d’allèles spécifiques lors de grandes pandémies. Les scientifiques à l’origine de cet article ont choisi d’étudier la plus dévastatrice de l’Histoire de l’Humanité : la peste noire, ayant décimé 30 à 50% de la population Afro-Eurasienne entre 1346 et 1350.
Cette maladie, provoquée par la bactérie Yersinia pesti, a ensuite ressurgi durant les 400 années suivantes par vagues, avec une mortalité en général moins élevée que lors du premier épisode de peste noire. Ce phénomène pourrait être dû à une modification de la bactérie, ou bien une adaptation des organismes humains ! En étudiant l’ADN d’individus morts avant, pendant et après la peste noire, les chercheurs ont conclu que quatre gènes auraient eu des allèles « protecteurs », en particulier le gène ERAP2, codant pour l’aminopeptidase 2 du réticulum endoplasmique. Les individus homozygotes pour l’allèle protecteur d’ERAP2 avaient 40% de chances de survivre à la peste noire par rapport à ceux homozygotes portant les autres allèles, car cela leur conférait une meilleure capacité à limiter la prolifération bactérienne grâce aux macrophages.
Cependant, même si cet allèle d’ERAP2 protégeait de la peste noire, il est de nous jours un facteur de risque pour des maladies auto-immunes comme la maladie de Crohn et la polyarthite rhumatoïde … Il semblerait qu’un système immunitaire extrêmement efficace au Moyen-Age ne serait donc plus adapté de nos jours, montrant la grande importance de l’adaptation des organismes aux changements environnementaux au cours de l’Histoire. La suite de ces recherches visera à étudier la totalité du génome, et pas seulement les gènes impliqués dans le système immunitaire … Ce domaine de recherche est une formidable manière d’étudier les mécanismes qui ont contribué à notre survie jusqu’à aujourd’hui !